jeudi 3 juin 2021

LES SOIXANTE-QUINZE FEUILLETS (1908) - Marcel PROUST - NRF Gallimard

 Un événement dans le monde littéraire : la publication d’un inédit de Marcel Proust !

« Le roman de 1908 »´
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Présentation par l'Editeur :

"Graal proustien, les « soixante-quinze feuillets » de très grand format étaient devenus légendaires. La seule trace qui en existait était l’allusion qu’y faisait Bernard de Fallois, en 1954, dans la préface du Contre Sainte-Beuve. En 1962, ils n’avaient pas rejoint la Bibliothèque nationale avec le reste des manuscrits de l’auteur de Swann. Leur réapparition en 2018 à la mort de Bernard de Fallois, après plus d’un demi-siècle de vaines recherches, est un coup de tonnerre.

Car les insaisissables « soixante-quinze feuillets » de 1908 sont une pièce essentielle du puzzle. Bien antérieurs au Contre Sainte-Beuve, ils ne font pas que nous livrer la plus ancienne version d’À la recherche du temps perdu. Par les clés de lecture que l’écrivain y a comme oubliées, ils donnent accès à la crypte proustienne primitive. « Un livre est un grand cimetière où sur la plupart des tombes on ne peut plus lire les noms effacés », lit-on dans Le Temps retrouvé : mais ici, Léon temps n’a pas encore effacé tous les noms."
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Le bonheur !
Impression d’assister à la naissance d’un chef d’œuvre...
C’est bien avec ces feuillets que commence « À la recherche du temps perdu »
On y retrouve :
Le drame du coucher, le baiser du soir, le portrait de Swann, Venise et bien d’autres épisodes...
Une "recherche" avant la lettre..
En complément on découvre d’autres manuscrits également inédits.
Dans une troisième partie, assurée par Nathalie Mauriac Dyer, à qui l’on doit cette époustouflante édition des Feuillets,  on trouve toute une série de compléments fort intéressants : notices, chronologie, notes.
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Cet ouvrage n’est pas destiné aux seuls amoureux de "A la recherche", il est aussi une bonne introduction au monde de Proust comme le précise Jean-Yves Tadié :

" Oui c'est clair c'est une très bonne introduction. Et on voit que le monde de Proust est un monde très simple. Ce n'est pas un monde snob, ce n'est pas un monde de riches, c'est un monde simple, humain : une famille, un enfant, une soirée... La solitude, aussi ; la méchanceté, déjà , puisqu'on voit que la grand-mère est persécutée par son mari et par son beau-frère... Et c'est très touchant aussi. Dès le début, on voit que le monde de Proust est comme le nôtre : un monde cruel. "
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EXTRAITS :
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« Puis on apporta les lampes. Tous les soirs leur vue, le bruit des rideaux qu’on fermait aussitôt après me serrait le cœur. Car je sentais que dans quelques heures viendrait l’affreux moment où il fallait dire bonsoir à Maman, sentir la vie m’abandonner au moment où je la quittais pour monter dans ma chambre, et ensuite souffrir ce qu’on ne saura jamais, dans ma chambre, d’où j’entendais le bruit d’en bas, jusqu’au moment où je parvenais à m’endormir. Quand j’y parvenais. »

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"Un champ plein de coquelicots me fait penser que la poésie est une réalité et que le bonheur et la bénédiction peuvent descendre sur la terre."

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"Le reste de la façade était en murailles où retombaient des clématites et… une aubépine rose. L’arbuste que j’ai toujours le plus aimé, que j’ai tellement aimé qu’il m’est par moments, quand il penche, laisse retomber en souriant ses fleurs roses et confuses, presque impossible de ne pas croire que je suis quelqu’un de particulier pour lui comme il est quelqu’un de particulier pour moi, depuis le temps que je l’aime et que déjà quand j’étais tout petit on plaisantait ma passion pour la fleur aimée. Quand je tombai si malade là-bas la première joie de ma convalescence fut la visite d’une cousine que j’aimais, que je n’aurais jamais cru qui fût venue à la maison, et une grande branche d’aubépine rose qu’elle m’apporta. Elle était la parure merveilleuse de l’autel et quelque chose qui dans les chemins à la grâce divine et embaumée de l’aubépine que j’adorais ajoutait de la couleur, la même couleur que les biscuits roses de Tours qu’on sortait de leur boîte après le déjeuner les jours de grande faveur, ou que le fromage à la crème quand on y avait écrasé des fraises."

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"Aujourd’hui encore quand je pense qu’il y a des chemins où il y a de l’aubépine rose ils me paraissent faits d’une substance particulière analogue au rêve, il me semble si ma triste infirmité ne m’empêchait de m’y promener que j’y pénétrerais dans ma douzième année et que bien des choses qui me semblent de la couleur insignifiante de l’expérience redeviendraient pour moi belles, mystérieuses, analogues à cette réalité divine que nous touchions partout alors et que ne l’ayant jamais trouvée dans la vie nous essayons si péniblement plus tard, quand nous sommes artistes, de découvrir et d’élucider dans notre cerveau."

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Marcel Proust
(1871-1922)
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3 commentaires:

  1. Magnifique et émouvante note!
    Quelle extraordinaire découverte
    littéraire et éditoriale ...
    Je n'ai lu Proust que par passages
    pris par ci par là dans
    La Recherche : des descriptions étonnantes
    et l'expression fine et attentive des
    sentiments et des perceptions.
    Amitiés de
    JPS

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  2. Tu me donnes envie de me replonger dans La Recherche
    par le biais de ce livre exceptionnel!
    Trois bonnes semaines d'absence sur le net, histoire
    de prendre un peu l'air!...
    Bon mois de Juin et Amitiés de
    JPS

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  3. Je me suis évidemment intéressé à Proust. Il y a longtemps. Mais je n'ai lu de lui qu'un ouvrage, "Un amour de Swan", me promettant de ne pas recommencer. je crois me souvenir pourtant que son univers méritait l'intérêt de la lecture. Mais, son écriture était si difficile à lire (des phrases d'une demi-page, par exemple) ! J'aurais dû insister bien sûr. J'étais sans doute trop paresseux à l'époque.

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